L’opprimé : une responsabilité ignorée
Depuis des décennies, les mouvements de libération en Afrique et dans le monde noir ont concentré leurs efforts sur la dénonciation de l’oppresseur : le colon, l’impérialiste, le système néocolonial. Cependant, cette stratégie s’est souvent heurtée à des échecs répétés, parce qu’elle a négligé un élément fondamental de la chaîne d’oppression qui l’opprimé lui-même.
L’erreur stratégique des leaders africains
De nombreux leaders historiques se sont époumonés à mobiliser un peuple endormi. Malcolm X le reconnaissait amèrement : "La plus grande erreur du mouvement a été de chercher à mobiliser un peuple endormi pour atteindre les objectifs de grandeur. Il faut d’abord réveiller le peuple." Le colonialisme a prospéré parce que les peuples étaient amorphes, résignés ou complices, rendant vaines les luttes de figures comme Thomas Sankara, Patrice Lumumba ou Sylvanus Olympio, rapidement éliminés. Tout repose sur le peuple pour briser la domination ou la fortifier.
Le courage mal dirigé des jeunes militants
Trop de jeunes militants confondent le combat avec le sacrifice physique. Ils croient que donner leur vie est le summum du patriotisme. Pourtant, le plus grand sacrifice réside dans l’effort long et ingrat de réveiller les consciences. C’est une tâche bien plus ardue que d’affronter les matraques et les balles. Beaucoup de leaders, par paresse ou manque de vision, n’ont pas investi dans le changement des mentalités, préférant les résultats visibles et immédiats.
Un leadership défaillant face à un système structuré
La domination perdure aussi grâce à des leaders mal formés, qui se contentent de bribes d’informations glanées sur les réseaux sociaux. Comment espérer vaincre un système impérialiste, armé des meilleurs intellectuels et stratèges, juste en se basant sur des slogans et des poings levés ? La formation rigoureuse est essentielle. Sans elle, le combat est voué à l’échec.
L’importance d’une avant-garde solide et fédératrice
Créer des organisations multiples sans structure ni coordination affaiblit la lutte. L’histoire montre que seules les avant-gardes intégrales (politiques, économiques, sociales) ont résisté et vaincu. Les leaders africains doivent dépasser leurs égos et fusionner leurs forces en un mouvement unifié et puissant, capable de tenir face à l’adversité.
Le peuple : victime ou complice ?
Un des plus grands échecs des leaders est de constater l’indifférence du peuple pour lequel ils se battent. Charles De Gaulle lui-même n’aurait pas imaginé que le néocolonialisme durerait aussi longtemps, mais il a trouvé un peuple africain résigné, qui préfère le silence et méprise ceux qui luttent pour lui. Ce peuple, dominé par l’égoïsme et la peur, devient un puissant allié involontaire du système qui l’opprime.
L’urgence d’une révolution des mentalités
Frantz Fanon le disait que politiser les masses, ce n’est pas tenir un discours politique. C’est s’acharner à leur faire comprendre que tout dépend d’elles. Les leaders actuels doivent intégrer cette vérité fondamentale : sans un peuple conscient et éveillé, toute lutte est vaine. La priorité doit être de forger cette conscience collective, car la véritable libération commence dans les esprits.
Conclusion : vers une nouvelle stratégie
Le combat contre l’oppression ne se gagnera pas uniquement sur le terrain politique ou militaire. Il exige un travail de fond sur les mentalités du peuple. Tant que celui-ci restera passif, résigné ou complice, aucune victoire durable ne sera possible. Les leaders de demain devront donc prioriser la formation et la conscientisation du peuple pour briser définitivement les chaînes de l’oppression.